Du 7 au 11 mars 2023

Cette destination m’a été vivement recommandée par une voyageuse hollandaise que j’avais rencontrée pendant le trek des Annapurnas, on peut y faire une boucle de trois ou quatre jours en scooter dans un superbe décor naturel de montagnes, de rizières et de villages pittoresques. Je pensais que c’était un endroit peu connu, réservé aux initiés, mais dès mon arrivée à Hanoï, j’ai vite compris que cela faisait partie des principales attractions proposées aux touristes et qu’il y aurait donc du monde.

En arrivant en fin de journée après un long voyage en bus depuis Hanoï dans une configuration assez surprenante de bus avec des sièges semi inclinés sur deux niveaux dont le premier à même le sol, j’ai eu la mauvaise surprise d’apprendre qu’il fallait un permis de conduire international pour pouvoir faire cette boucle en scooter car il y avait eu un accident mortel d’un touriste il y a quelques semaines et la police faisait de nombreux contrôles. Donc le gérant de mon auberge refuse de me louer un scooter et me propose de faire la visite avec un chauffeur de scooter ou dans un bus, c’est hors de question pour moi, je veux être autonome pour faire cet itinéraire qui a l’air très intéressant.

Finalement, je trouve une autre auberge qui accepte de me louer un scooter en me proposant un chauffeur uniquement pour les premiers kilomètres afin de passer le premier point de contrôle qui est le plus à risque. Je suis soulagé et je suis prêt à prendre le risque d’un contrôle plus tard mais, après avoir demandé à quelques touristes qui ont déjà fait le tour, cela ne semble pas fréquent.

C’est donc parti pour quatre jours en scooter. Dans mon auberge, je rencontre un espagnol qui a acheté un scooter au Vietnam pour traverser le pays du sud au nord pendant un à deux mois. C’est une option assez souvent privilégiée par les « backpackers » qui ont du temps au Vietnam car le prix d’achat est relativement bas (environ 300€) et, normalement c’est possible de le revendre assez proche du prix d’achat en prévoyant quelques frais de réparation sur la route mais c’est bien moins cher que de louer un scooter et cela évite de devoir revenir à son point de départ. J’ai hésité à le faire quand j’étais à Hanoï mais finalement j’ai renoncé car cela représenterait beaucoup de kilomètres pour tout l’itinéraire que je compte faire notamment dans le nord avant d’aller au sud et généralement cela demande plus d’un mois. Je continue donc sur mon mode de voyage depuis la Turquie en me déplaçant majoritairement en bus puis en louant un scooter dans les lieux intéressants.

Je ne vais pas être déçu sur cet itinéraire même si le soleil ne sera pas souvent au rendez-vous. Le premier jour, un brouillard épais masque une grande partie du paysage et l’air est très humide avec une fine pluie, pour l’occasion j’ai mis de magnifiques sacs plastiques bleus qui recouvrent mes chaussures. Ils tiendront tout juste pour la journée mais heureusement je n’en aurais pas besoin pour les autres jours. Il y a malgré tout de beaux paysages de montagnes de calcaire recouvertes de végétation entourant des rizières qui s’étirent sous formes de vagues. Parfois les rizières sont en étages à flanc de collines quand la pente n’est pas trop raide.

Je prends le temps de faire des détours sur des petites routes en lacets afin de m’éloigner des grands axes où parfois je croise des groupes de touristes en tour organisé sur des dizaines de scooters, c’est impressionnant.

Le midi, j’arrive à trouver un bon petit restaurant comme je les aime avec uniquement des locaux et un bon plat unique à un prix modeste, cela me rappelle mon parcours à moto dans le Rajasthan où j’essayais à chaque fois de trouver un bon restaurant local que j’appelle « un bon routier », c’est l’avantage de pouvoir me déplacer facilement avec mon véhicule.

Ma première auberge du parcours proche de la ville de Yên Minh est très sympathique avec un dortoir en bois et des matelas posés à même le sol tout en étant cloisonné par des rideaux. Je rencontre de nombreux voyageurs qui font le même itinéraire que moi, chacun avec sa technique pour éviter une amende en cas de contrôle de police : certains essayent comme moi d’éviter ces contrôles, un groupe a fait appel à un conducteur vietnamien qui sert d’éclaireur, d’autres font leur propre document… L’auberge fournit un repas collectif avec une multitude de plats vietnamiens disposés sur de larges tables en bois avec un alcool de riz en guise d’apéritif, l’ambiance est très conviviale!

Le deuxième jour, quelques rayons de soleil commencent à pointer le bout de leur nez en début de matinée, c’est encourageant. Je fais fréquemment des arrêts sur la route pour prendre le temps d’observer les paysages et de prendre des photos. Les travaux dans les champs sont encore très manuels et beaucoup de cultivateurs portent le fameux chapeau conique du Vietnam.

Travaux manuels dans les champs face aux montagnes de calcaire

La route principale est bloquée en raison de travaux donc plutôt que d’attendre j’emprunte un itinéraire bis par de plus petites routes et ce sera bien mieux. Pendant cette journée, je vais en prendre plein les yeux avec des vues magnifiques sur des paysages différents mais aussi en commençant par de la poussière sur une route en travaux projetée dans un nuage par un 4×4 pressé.

Le ciel se découvre progressivement, ce qui permet de mieux apprécier les couleurs et les reliefs et il y en a dans cette région ! Des villages sont encastrés à flanc de montagnes au milieu de roches volcaniques et ils arrivent quand même à cultiver dans la moindre parcelle disponible, c’est impressionnant. Les routes zigzaguent en lacets au milieu de ces montagnes et nous font découvrir de nouveaux points de vue, je m’arrête très souvent et je comprends pourquoi cet endroit est si populaire, ça en vaut le détour même si on est pas le seul.

Cultures et habitations au milieu d’une roche qui semble d’origine volcanique

Après une vallée de terre orange avec de la roche noire je bascule dans une autre vallée recouverte de végétation et je ne croise quasiment personne sur cette portion de route, c’est grisant. Je prends un déjeuner copieux avec encore une fois plusieurs plats avec du riz, de la viande, des légumes, une soupe pour un prix très raisonnable.

Le ciel est toujours bien dégagé, je profite au maximum de cette belle journée en accumulant les kilomètres de routes en lacets traversant des vallées montagneuses aux couleurs différentes, je me régale. Désormais le soleil tire lentement sa révérence ce qui ajoute de nouveaux contrastes de lumières et de belles formes d’ombres.

Tout simplement…
… beau!

Hà Giang est situé au nord est du Vietnam et le circuit permet de se rapprocher au plus près de la frontière avec la Chine que l’on peut observer d’un point de vue en hauteur avec un grand drapeau vietnamien qui flotte au vent. La route finale est merveilleuse, un revêtement en parfait état, une succession de virages pas trop serrés et avec de la visibilité tout en pouvant apprécier la vue sur les montagnes et le coucher de soleil, il n’y a quasiment personne sur la route, je savoure à fond ce moment. C’est une des plus belles journées de mon voyage au Vietnam.

Le soir je rencontre de nouveaux voyageurs dans le dortoir de mon auberge à la ville de Dong Van, une anglaise et un argentin, chacun a acheté un scooter et fait le tour du Viêtnam, c’est une belle aventure qui me donne envie mais c’est trop tard. Nous prenons le dîner ensemble tout en nous racontant nos périples puis nous allons nous coucher tôt en espérant que le soleil soit toujours de la partie demain.

Le troisième jour est couvert, j’attends un peu en me baladant à pied en haut d’une ancienne forteresse française en espérant que cela se dégage mais le soleil ne réapparaitra pas. Sur la route, je croise de nombreux enfants dans les villages qui m’adressent très souvent de beaux sourires en me disant « hello » et en m’adressant un signe de la main. C’est également un saut dans le passé comme dans les montagnes au Népal où l’on voit encore des paysans bêcher le sol, un enfant qui guide un veau pour tirer une charrue dans un champ, il y a beaucoup de travaux manuels et la plupart des habitants portent des habits traditionnels dont les couleurs et les formes varient en fonction des ethnies qui sont nombreuses dans cette région.

En haut d’un col, il y a un monument dans le plus pur style communiste avec des sculptures grises qui ressemblent à un amas de blocs gris sans beaucoup de finesse, c’est froid, uni et lisse, sans nuances. Ce monument célèbre l’œuvre des nombreux travailleurs dont certains « volontaires » de chaque village qui ont permis de construire la route dans des conditions très difficiles avec malheureusement des pertes humaines. Malgré tout, cette voie est dénommée la « Happy road » car elle a permis d’apporter aux villageois les bienfaits de la société moderne : l’éducation, les soins, l’électricité…

Monument en l’honneur des travailleurs qui ont construit cette route dans les montagnes, dont certains y ont laissé leur vie

La vue est à nouveau un peu masquée au loin par une fine brume, on peut quand même apercevoir les reliefs mais c’est moins envoûtant que la veille. Le soir, je fais la connaissance de nouveaux voyageurs pendant le dîner collectif à l’auberge dans le village de Du Già, c’est très agréables ces étapes, on ne s’ennuie pas.

Le lendemain matin, c’est jour de marché dans le village, il y a une foire aux animaux avec les habitants de la vallée qui portent leur habit traditionnel, notamment les femmes mais il y a aussi des hommes qui portent un béret noir. C’est très convivial, les habitants en profitent pour se retrouver, discuter, plaisanter et faire leurs courses.

Avec quelques voyageurs de l’auberge nous partons en scooter visiter une cascade puis avec Raphaël, un jeune français qui a lui aussi acheté sa moto, on reste même pour se baigner. L’eau est fraîche mais ça fait du bien.

Ensuite, on fait un bout de route ensemble avec Raphaël puis on se sépare après le déjeuner car nous n’allons pas dans la même direction. Je rentre sur Hà Giang sans avoir eu de contrôle de police, mission accomplie !