Jour 7 (24/09/2022)

Après une nuit encore fraîche sous la tente dans un camping au bord du lac Bohinjsko jezero situé au parc national de Triglaski, j’ai prévu un petit trajet à moto cette journée afin de pouvoir profiter davantage du lieu. Je remballe mes affaires et je recouvre mon sac à dos par des sacs poubelles car le ciel s’est couvert et ils annoncent de la pluie dans la journée et les jours suivants, on dirait que je transporte un cadavre sur ma moto mais au moins cela devrait protéger mes affaires, ce sera un nouveau test !
Je n’ai pas eu beaucoup de temps pour repérer les itinéraires de randonnée et je n’ai prévu que la matinée donc j’opte pour un chemin simple au départ du lac qui monte jusqu’à la cascade de Slap Savica, agréable à regarder avec ses eaux de couleur vert émeraude mais j’ai préféré la marche d’approche. Il y en a pour environ une heure à la montée avec une pente assez douce donc c’est une promenade mais c’est agréable de pouvoir se déplacer au calme dans la nature avec peu d’affaires sur soi. Je redescends faire mon picnic au lac et sans baignade cette fois-ci car je ne voudrais pas arriver trop tard à la capitale Ljubiana afin de la visiter en fin de journée.

Vue sur le parc Triglaski et le lac Bohinjsko jezero au niveau de la cascade Slap Savica

Je reprends la moto sur une jolie route de montagne qui passe notamment par le lac de Bled qui vaut le détour avec une île au milieu sur laquelle a été bâtie une église et il y a également un beau château sur le haut d’une falaise aux abords du lac. C’est difficile de se garer à proximité du lac mais, au voyage aller la veille, j’avais quand même réussi à faire une pause express pour la photo, c’est un des nombreux avantages de la moto.

Lac de Bled

La ville de Ljubljana n’est pas très loin et j’arrive à mon hébergement vers 16h. C’est une auberge de jeunesse que j’ai réservée à la hâte avec comme critère qu’il y ait un parking pour sécuriser ma moto mais je me rends compte qu’elle est très éloignée du centre-ville et, de plus, ses locataires ne correspondent pas vraiment à l’idée que je me faisais de ce type d’hébergement sur la base de l’auberge espagnole avec des jeunes européens en voyage. Ce sont plutôt des personnes issues des pays des Balkans, parfois approchant la quarantaine, et qui sont là principalement pour gagner leur vie.
Je fais la rencontre de mes deux premiers colocataires dans notre dortoir de 6 lits, ils sont issus du Kosovo et ils vont d’un pays européen à l’autre pour travailler en fonction des opportunités qui s’offrent à eux avec l’aide de leurs proches. Fatlind parle anglais donc nous pouvons plus facilement sympathiser, il s’est spécialisé dans la confection et la vente de glaces à emporter, il me parle de son pays d’origine avec passion et de son envie de découvrir d’autres pays dont la France. Je leur parle de mon itinéraire et ils sont curieux de voir ma moto, je me sens un peu en décalage avec mon projet de voyage de plusieurs mois que je peux m’offrir avec mes économies de cadre supérieur tout comme la moto de bonne qualité que je possède comparé à leur train de vie qui est, je suppose, bien plus modeste. Fatlind aimerait lui aussi une moto, avec son ami ils me posent des questions sur la puissance de ma moto, quelle est la vitesse maximale que j’ai atteinte mais je leur explique que c’est davantage le voyage qui me plait que la moto. Même si j’aime beaucoup en faire, je ne suis pas à la recherche de sensations fortes. Ils me montrent des vidéos de leurs amis sur des motos de courses BMW en train de faire des roues arrières sur l’autoroute, ce n’est clairement pas mon niveau!
J’en profite pour prendre une douche et tester le lavage de mes vêtements à la main puis je pars à pied visiter la capitale en laissant mes deux collocs qui sont déjà sur place depuis plusieurs jours donc je me doute que cela les intéresse moins. Je mets quasiment trente minutes à pied pour atteindre le centre-ville et j’ai tout juste une heure pour découvrir la capitale avant la tombée de la nuit. C’est une jolie petite ville avec ses nombreux ponts, ses terrasses et ses grandes rues piétonnes pavées. Par contre, je trouve le reste de la ville plutôt austère avec des grandes avenues et un peu trop de béton de style soviétique à mon goût. Cette balade en ville me fait également davantage prendre conscience de ma solitude alors que les jours précédents je ne m’en rendais pas compte car j’étais concentré sur la route ou bien en train de faire ou défaire le campement, rédiger le blog, manger… Bizarrement, quand je marchais seul dans la montagne slovène cela ne me dérangeait pas mais là, en ville, malgré la foule je me sens seul et je redoute d’avoir d’autres périodes d’ennuis comme celle-ci pendant ce voyage. Il va falloir que je fasse davantage d’efforts pour rencontrer des personnes.

Ville de Ljubljana

Dans ce but, je tâche de suivre les conseils d’un ami et collègue qui a l’habitude de voyager seul et qui n’hésite pas à aborder d’autres personnes pour discuter, notamment dans des bars. Je trouve donc un bar sympathique qui propose un large choix de bières (merci Google) et je savoure ma première boisson alcoolisée du voyage.

En faisant un rapide tour d’horizon, je constate qu’un autre homme en face de moi est attablé seul et, après quelques gorgées, je me décide à engager la discussion avec lui. Il m’explique qu’il attend des amis qui devraient arriver prochainement donc je retourne à ma table avec un sourire gêné. Je ne m’avoue pas pour autant vaincu et au deuxième verre, je m’aperçois que mon voisin à ma droite semble seul également et pianote sur son téléphone. Je tente une nouvelle approche, cela s’annonce plutôt bien car il n’attend personne et il est en voyage comme moi. Il est américain et il a prévu de visiter plusieurs pays d’Europe centrale avant de rejoindre des amis à Munich pour la fête de la bière Oktoberfest. Néanmoins, après quelques échanges je ne le sens pas très motivé pour relancer la discussion et il vient de recevoir son plat donc je le laisse dîner tranquillement et je me commande une troisième bière qui sera la dernière car j’estime avoir suffisamment tenter ma chance et je ne me vois pas tester toutes les bières du bar.

Bar Lajbah et son offre pléthorique de bières

Je rentre donc à pied à l’auberge pour me dégriser, il est 21h30 et c’est samedi soir, le dortoir est vide. Je remarque un nouveau sac à dos qui pourrait être celui d’un voyageur perdu comme moi dans cette auberge. Je commence à mettre à jour mon blog quand soudain, la porte s’ouvre et je découvre ma nouvelle colocataire qui s’appelle Laure, elle est française et voyage en Europe avec le pass Interrail qui est très pratique et d’un bon rapport qualité prix.
Tout comme moi, elle ne se sent pas très en phase dans cette auberge qui n’est pas dans l’ambiance des autres auberges qu’elle a faite et elle ne compte pas s’éterniser, sa prochaine destination sera l’Italie. Puis nos deux locataires reviennent dans le dortoir et un nouveau nous rejoint également, il est slovène et fait un stage dans la région pour devenir coach en badminton. La conversation s’engage principalement avec Fatlind et Laure, l’ambiance est finalement sympathique et cela permet de terminer cette soirée sur une bonne note. Je leur montre le parcours que j’ai prévu, on discute des cultures de différents pays et on s’échange nos comptes Instagram avant de se coucher vers minuit.

Début du jour 8 (25/09/2022)

On se lève tôt dans le dortoir, tout le monde est réveillé ou déjà parti à 8h. Je remballe mes affaires en recouvrant mon sac à dos de sacs poubelles pour protéger de la pluie comme la dernière fois. Les affaires que j’ai lavé à la main ne sont pas sèches, tant pis je les ferai sécher en fin de journée, je préfère partir le matin tant que je suis motivé même s’il pleut. Je mets également les vêtements de pluie que m’ont gentiment donné Philippe et Monique. Je dis au revoir à mes colocataires et je repars en moto.
La route est ennuyante dans un milieu périurbain sans relief et sans authenticité, c’est une succession de ronds-points, de maisons individuelles assez banales et de champs de culture mis à part le charmant château Otočec situé sur une petite île que traverse la petite route que j’emprunte.

Château Otočec, un oasis dans un désert périurbain

Ces conditions me plongent dans un état d’esprit maussade et j’en viens à oublier que j’ai une frontière à passer avec pour la première fois un contrôle d’identité car la Croatie ne fais pas partie, pour le moment, de l’espace Schengen. Autre changement il n’y a plus l’euro et surtout, à ma grande tristesse, je ne vois plus dans mon horizon la chaine des Alpes et ce sera pour un long moment…
Allez, il y aura d’autres montagnes à voir : cap à l’Est !