Jour 124 (19/01/2023)
Basé sur mon expérience récente de motard du Rajasthan, je me lève tôt afin d’avoir de la flexibilité pour ma journée à moto et je fais bien car je galère à sortir de la ville de Jodhpur avec toutes ces intersections et ces échangeurs dignes d’une mégalopole. Je suis obligé de faire de fréquents arrêts pour vérifier que je suis au bon endroit et ce n’est qu’au bout d’une quarantaine de minutes que j’accède enfin à la route principale en direction de Udaipur où je peux rouler plus facilement.
J’en profite pour prendre mon petit déjeuner sur un stand de nourriture en bord de route dans un village et le prix est dérisoire. Ils n’ont pas de thé vert donc je fais exception en prenant un verre de tchaï afin de me réchauffer mais je ne me fais toujours pas à ce thé indien qui est un mélange de thé noir avec du lait et des épices, on peut le trouver partout et les indiens l’apprécient beaucoup.
Ensuite, je fais un nouvel arrêt rapide pour visiter le temple Om Banna qui est dédié à Om Singh Rathore et à sa moto, une Royale Enfield Bullet 350, à bord de laquelle il est décédé en percutant un arbre, probablement à cause de l’alcool. Lorsque la moto a été perquisitionné par la police, elle se serait mystérieusement volatilisée pour se retrouver à l’endroit exacte de l’accident. Cet évènement a été vu comme un miracle et un petit temple a été bâti sur le lieu de l’accident avec la moto couronnée de fleurs pour rendre hommage au défunt mais aussi pour que les passants puissent prier afin d’avoir un trajet sans accident. Décidément, il y a des temples très originaux en Inde, cela m’amuse tout en me rappelant d’être prudent pour ne pas connaître le même sort !
Plus loin sur la route apparaissent de grands blocs de rochers agglomérés les uns sur les autres comme dans la savane africaine. Je commence à croiser également assez souvent des hommes en sandales avec un grand turban rouge sur la tête et habillés de blanc qui guident au bord de la route des troupeaux de chèvres avec une longue faux en bois. Il y a aussi des hommes qui portent sur la tête un turban de couleur rose flamboyant.
La route devient de plus en plus belle avec des virages, de la végétation, des collines et des tribues de singes au bord de la chaussée. Je m’arrête régulièrement pour faire des photos en gardant un regard attentif sur les singes car ils ont l’air d’avoir l’habitude de recevoir de la nourriture de la part des automobilistes de manière plus ou moins volontaire. D’ailleurs, je vois un singe accroché sur le toit d’une voiture en route qui cherchait sans doute à récupérer quelque chose à manger !
Charmé par cette route sinueuse dans un décor vallonné et verdoyant, je décide de faire un détour pour continuer sur cette belle route. Un jeune homme lève le bras en bord de route et je l’emmène à l’arrière de la moto pour le déposer à son village quelques kilomètres plus loin. En descendant, il m’invite à prendre un café dans un magasin de vêtements qui appartient à son frère et nous faisons quelques photographies ainsi qu’une petite vidéo où je lis un texte en hindou pour recommander son magasin. Je leur ai promis de le faire donc je vous donne le nom du magasin, du propriétaire et de la ville au cas où vous passeriez dans le coin et que vous seriez intéressés pour acheter un sari ou un turban, merci de m’envoyer la photo ! 😊 En remerciement de m’être prêté au jeu, ils m’offrent un turban local et une petite écharpe que je me débrouille à ajouter à mon chargement puis je repars à moto.
Je traverse ensuite plusieurs villages espacés à quelques dizaines de kilomètres, la route passe au milieu du massif de moyennes montagnes des Aravelli qui sont des remparts naturels de chaque côté de la route et, au milieu de ce couloir, il y a de nombreux champs verdoyants et des points d’eau. Je croise des buffles pour la première fois, le dénivelé augmente et je passe un petit col dans une route à lacets, c’est un régal et je m’arrête très souvent pour admirer le paysage, c’est magnifique. La route est plutôt en bon état bien qu’étroite avec quelques nids de poules et parfois du sable en bordure.
Lorsque je finis par rejoindre la voie rapide au niveau de la ville Nathdwara je pensais rouler sans m’arrêter mais je découvre au loin, stupéfait, la silhouette d’une immense statue hindoue assise sur un rocher. En me rapprochant, je découvre qu’elle est a la couleur du bronze et qu’elle tient un trident, qui est appelé “trishula” dans la religion hindou. Je pensais au début que mon estimation de la taille de la statue était faussée par un effet d’optique mais pas du tout, sa taille ne fait qu’augmenter et lorsque j’arrive à me garer à proximité je suis impressionné par ses dimensions hors norms ! Après renseignements, il s’agit de la « statue de la croyance » (« statue of belief » en anglais), elle représente la déesse Shiva. Le monument a été ouvert au public très récemment, depuis le 29 octobre 2022 et elle mesure 112 mètres de haut.
J’arrive à mon auberge en fin de journée après m’être faufilé tant bien que mal dans les ruelles du centre-ville, je suis fatigué mais heureux de ma journée, la plus belle route du parcours au Rajasthan jusqu’à présent ! Je fais un rapide tour à pied dans mon quartier puis je rentre à l’auberge pour me reposer en dînant sur le toit terrasse, c’est très agréable.
Jour 125 (20/01/2023)
Aujourd’hui, c’est jour sans moto pour prendre le temps de découvrir la ville de Udaipur qui semble être prisée par les touristes au vu du nombre d’hôtels et restaurants concentrés au bord du lac dans la vielle ville. Je commence par la visite d’un temple hindou appelé Jagdish qui date du milieu du XVIIème siècle, il a de belles sculptures, notamment des éléphants qui sont souvent représentés.
Puis, je visite le fort du maharaja, appelé palais de ville, comme à Jaipur, ses façades sont en blanc avec de beaux balcons à colonnades, il y a aussi des cours intérieurs avec de la verdure rafraichissante, de belles vues sur le lac et les montagnes ainsi que de somptueuses pièces richement décorées à l’intérieur comme à l’extérieur.
La ville d’Udaipur était la capitale de l’État princier de Mewar qui résista aux invasions de seigneurs musulmans et cet état ne fut jamais entièrement dominé malgré des défaites face aux moghols au début du XVIème siècle. La ville de Chittorgarh était auparavant la capitale mais elle était trop difficile à défendre et il fut donc décidé de transférer la capitale à Udaipur, au bord du lac et au milieu des montagnes.
Des panneaux présentent plus en détails le personnage historique du maharaja Sangram Sing I qui parvint à unifier plusieurs états princiers du Rajasthan pour lutter contre l’invasion moghol et il réussit une première fois à vaincre le premier empereur moghol, Babur, qui devint fou de rage et de honte et jura de ne plus boire de vin pour invoquer la faveur de son dieu. Lors d’une nouvelle bataille, Sangram Sing I et ses alliés furent vaincus notamment du fait de l’utilisation novatrice d’armes à feux dans le camp moghol et il décéda quelques années plus tard, empoisonné par ses propres hommes qui ne souhaitaient plus continuer le combat. Son parcours me fais penser à Vercingétorix dans sa lutte contre les armées romaines de César, d’abord victorieux puis vaincu et qui est devenu ensuite une figure historique du roman national.
Après un déjeuner dans la rue, je continue ma visite de la ville en me baladant en dehors du quartier touristique et je découvre de belles peintures sur les murs de maisons dans des quartiers populaires. Puis, je rentre en début d’après-midi pour lire et travailler sur le blog, j’ai l’impression d’avoir fait le tour des principaux centres d’intérêts de la ville et je n’ai pas la motivation de parcourir la ville en long et en large.
En fin de journée, je fais un dernier petit tour à proximité au bord du lac sur les marches de ghats comme à Pushkar. La lumière est très belle sur les monuments (cf photo de couverture).
Puis, Alice et Elyasse me retrouve sur le toit terrasse de mon auberge afin de profiter du spectacle du coucher du soleil. Nos parcours se sont croisés plusieurs fois dans le Rajasthan mais, dès le lendemain, ils partiront au sud tandis que j’irais à l’est donc nous profitons de ce dernier moment ensemble à moins que peut-être nos routes se croisent une autre fois. Nous sommes rejoints par Arnau, un catalan qui voyage également plusieurs semaines en Inde et nous buvons quelques bières en admirant la vue. Les auberges du Rajasthan sont très agréables et d’un bon rapport qualité prix, cela me rappelle celles d’Iran où la terrasse sur le toit était remplacée par un joli jardin dans une cour intérieure.