Jour 118 (13/01/2023)
La ville de Pushkar est très touristique avec une proportion plus importante d’étrangers et il y a beaucoup de magasins de souvenirs et des restaurants proposant des plats de différents pays, sans doute pour les nostalgiques des pizzas, pastas et burgers. J’entends davantage parler français et cette destination semble être prisée par les touristes ou voyageurs au look hippies avec cheveux longs.
La ville de Pushkar entoure un lac avec de larges marches, appelées « ghats », qui permettent aux pèlerins hindous de venir s’immerger dans l’eau du lac qui est considérée comme sacrée.
Je me suis fait avoir la veille au soir par un charlatan en m’approchant des berges par curiosité, fatigué par ma première journée en moto. Il m’avait dit que je devais retirer mes chaussures car c’était un temple et qu’il pouvait me faire visiter. Quand je lui avais indiqué que je n’avais pas besoin de guide il m’avait répondu qu’il était brahmane et qu’il ne demandait pas à être payé. Puis il m’avait invité à venir au bord de l’eau et il m’avait mis de la peinture sur le front. Ensuite, il m’avait attaché un bracelet autour du poignet en me parlant d’une donation pour le temple qui aiderait à faire vivre ses humbles serviteurs, c’est là que j’avais senti le piège se refermer. Il était trop tard pour partir sans rien donner, je mis fin à la cérémonie et je déposai un billet dans un plateau qu’il jugea trop modeste puis je partis.
Donc, désormais je fais attention à où je mets les pieds sur les marches au bord du lac mais c’est difficile de savoir car il n’y a pas de panneaux en anglais, je tâche d’observer les gens. Au bord d’un ghat en milieu de matinée, un groupe d’indiens s’installent sur les marches avec des habits colorés et commencent à faire des ablutions malgré la fraîcheur des températures mais, heureusement, il y a du soleil. Les hommes et les femmes se baignent à moitié dénudés, certains hommes ont également le crâne nu. Malgré la célébrité de ce lieu saint de l’hindouisme, cela reste un endroit paisible en comparaison des autres villes indiennes.
J’essaie de prendre le temps de regarder par mes propres yeux plutôt qu’à travers l’écran de mon téléphone quand je prends des photos. Il y a des vaches également au bord des bassins à qui on donne des graines.
Ensuite, je visite le temple Brahma de Pushkar qui est un des rares en Inde consacré à ce dieu mais je ne lui trouve pas un grand intérêt, il est petit et sans beaucoup de décorations donc je n’ai pas de regrets de ne pas pouvoir prendre de photographies. Jusqu’à présent, je n’ai pas vraiment ressenti dans les temples hindous la même sensation de spiritualité et de recueillement que j’ai pu avoir dans la plupart des églises, mosquées et des temples sikhs que j’ai visités. Il y a peut-être trop de monde en mouvement et je suis un peu perdu pour le moment avec tous ces dieux dont ce n’est pas toujours évident de cerner leur rôle.
Puis, je pars à moto visiter la ville de Ajmer, située à seulement une dizaine de kilomètres, et que j’avais rapidement traversée la veille. Elle ressemble davantage à une ville indienne standard avec la foule, le bruit et les stands de nourriture et les boutiques plus authentiques. Je découvre un fort construit sous l’empereur moghol Akbar au XVIème siècle pour sa résidence en cas de visite dans la région.
Un panneau explicatif met en avant le personnage historique de Prithviraj Chauhan qui était un roi hindou régnant sur le nord-ouest de l’Inde actuelle et dont la capitale était située dans la ville de Ajmer. Il a résisté au douzième siècle face aux attaques répétées d’un seigneur musulman mais il a été finalement vaincu et il est considéré comme l’un des derniers rois hindous ayant régné sur les territoires de l’Inde avant la domination du sultanat de Delhi puis de l’empire moghol.
Après cette visite, je me balade dans le bazar de Ajmer qui se trouve être également le quartier musulman. Nous sommes vendredi et je tombe par hasard sur une immense prière des fidèles qui installent des tapis dans la rue. Ils sont tellement nombreux qu’il n’est plus possible de passer, même à pied, et il faut faire un détour. Un peu plus loin je retrouve à nouveau de nombreux fidèles priant dans une large rue. La police est présente pour fermer progressivement les rues, tout cela dans une ambiance paisible, je ne ressens pas de tension. Il faut savoir qu’environ seize pour cents de la population indienne est de confession musulmane soit cent soixante-dix millions d’habitants, l’Inde est ainsi le troisième pays au monde en nombre de musulmans après l’Indonésie et le Pakistan!
Puis, je retourne à Pushkar par la route à lacets qui relie les deux villes voisines en surmontant une colline du haut de laquelle je fais une photo souvenir sur ma nouvelle moto dont je suis très content.
En me promenant dans les rues de Pushkar, je me rends compte que ce doit être une oasis pour certains touristes étrangers qui en ont assez du bruit et de la nourriture indienne car les rues étroites sont relativement calme et il y a un large choix de restauration occidentale. Je rejoins à pied le sommet d’une colline à proximité de la ville où est situé un temple hindou. Il y a le choix entre des escaliers ou des télécabines, j’opte pour la première option avec une bonne vingtaine de minutes de marche assez raide. L’endroit permet d’avoir une vue panoramique sur la ville et ses alentours mais le temps est légèrement brumeux ce jour là donc je me concentre sur l’observation d’une colonie de singes qui s’est installée sur les hauteurs. Ils sont très mignons avec leurs acrobaties et leurs mimiques, les mamans portent leurs bébés sous leur ventre en se déplaçant et elles inspectent méticuleusement la peau et les poils de leur progéniture pour retirer des insectes.
Ensuite, je redescends pour me poser sur les marches au bord du lac Pushkar un peu avant le coucher du soleil. Il n’y a quasiment plus personne à part quelques touristes occidentaux venus comme moi contempler le spectacle. Les cerfs-volants sont de retour dans le ciel, c’est un lieu agréable à cette heure de la journée.
Forcément, j’offre une cible de choix pour les personnes qui cherchent à soutirer quelques roupies aux touristes et un enfant vient à ma rencontre en me récitant mot pour mot le même discours que les autres rabatteurs adultes avec un sourire enjoué et confiant, j’en suis à la fois amusé et attristé : « Hello sir, where do you come from ? What is your name ? I know a good place if you want to visit… »
De retour à l’auberge, je me rapproche d’un pensionnaire de l’établissement qui s’entraine dans le jardin au maniement de boulets attachés à une corde et qui sont prévus d’être enflammés pour faire un spectacle visuel. Nous entamons la discussion, il s’appelle Andrea, il est italien et il prévoit de rester trois mois en Inde. Je sens qu’il est intéressé par mon voyage lorsque je le lui raconte et, à son tour, il m’explique que lors d’un précédent voyage il a traversé toute l’Eurasie principalement en autostop en passant par les pays dont le nom termine en “stan” (Kazakstan, Ouzbekistan, Tadjikistan…) puis, en traversant la Chine en train et, enfin, il a acheté une moto au nord du Vietnam pour le traverser jusqu’au sud et continuer par le Cambodge jusqu’au Laos : impressionnant !