Jour 75 (01/12/2022)

Le matin, je fais un petit tour dans le bazar de la ville de Qeshm mais qui n’a pas grand intérêt puis je prends le ferry pour Bandar Abbas où je retrouve Magid, qui vient gentiment me chercher en voiture à la sortie du port. Il est accompagné d’une amie à lui, dénommée Shima, qui serait intéressée pour voyager en m’accompagnant sur une partie de mon trajet. Au début, je suis un peu surpris par cette proposition mais nous faisons connaissance en déjeunant tous les trois ensemble chez l’ami de Magid et j’ai confiance en Magid après tout ce qu’il a fait pour moi.

Cependant, je précise bien que mon but est de rejoindre en auto-stop la ville de Chabahar qui est située quasiment à sept cent kilomètres de Bandar Abbas étant donné qu’il n’y a pas de ligne de bus sur cette route qui longe la côte et que je n’en ai quasiment jamais fait. Shima non plus mais, après avoir discuté longuement avec Magid qui semble l’encourager à m’accompagner, elle finit par accepter.

Pour aujourd’hui ce sera facile car nous pouvons utiliser un taxi collectif afin de rejoindre la ville de Minab qui est située à environ quatre-vingt-dix kilomètres donc il n’en restera plus que six cents à parcourir en auto-stop.

Shima trouve un logement dans une sympathique auberge avec des chambres dans des habitations traditionnelles dont les toits sont en bois léger et qui se situent au milieu d’un grand jardin de fleurs et d’arbres fruitiers. Il fait déjà nuit quand nous arrivons, nous nous installons et nous dînons sur place tout en discutant des options possibles pour les jours suivants puis nous nous couchons tôt car Shima souhaite voir le lever du soleil (je n’aurais pas la force de me lever aussi tôt).

Jour 76 (2/12/2022)

Le matin, nous prenons le temps avec Shima de profiter de l’hébergement traditionnel pour visiter le grand jardin avec le propriétaire. Il possède également une réserve de poissons dans un large bassin et de multiples variétés de fleurs et d’arbres fruitiers. Pour être franc, je ne suis pas un grand amateur d’arboriculture, préférant la visite de lieux historiques ou alors des balades en plein air mais je me borne dans ce cas à admirer les couleurs, les reliefs et les formes sans arriver à identifier toutes les espèces d’arbres et de plantes mis à part les plus connus. Généralement, j’oublie assez vite les explications sur ce sujet et, surtout, ce jour-là mon principal objectif est de commencer à faire de l’auto-stop car je ne sais pas du tout comment cela va se passer ni si nous arriverons à aller aussi loin que prévu. Cette incertitude est à la fois excitante et inquiétante car cette fois-ci je n’ai pas un fauteuil qui m’attend dans un bus avec un chauffeur pour m’emmener au lieu et à l’heure prévue.

Je tâche tout de même d’écouter avec attention les explications précises du propriétaire et de son fils qui nous accompagnent, ils possèdent vingt-deux variétés de palmiers, des manguiers dont l’un existe depuis plusieurs siècles, ils disposent des tas de têtes de crevettes autour des arbres pour fertiliser les sols. Ils ont aussi plusieurs variétés de citrons et d’orange qu’ils nous font goûter.

Nous terminons la visite au bout d’environ une heure puis nous rentrons dans notre chambre pour faire nos affaires mais je sens que Shima est indécise, ce que je comprends tout à fait car elle n’a jamais fait d’auto-stop et je ne peux pas non plus la rassurer en lui partageant mes expériences car je n’en ai pas ! Donc je décide d’appeler Zeinab afin qu’elle puisse nous donner quelques conseils et elle prend gentiment le temps de discuter avec Shima pour la rassurer. Après quelques minutes d’échange, on sent déjà une complicité s’installer entre elles.

Nous quittons finalement l’hôtel vers quatorze heures et nous prenons un taxi pour nous emmener à la ville de Minab car notre hébergement était situé à l’écart du centre. Il nous faut d’abord retirer de l’argent en liquide car Shima n’en a pas et je n’en ai plus beaucoup non plus mais il n’y a pas de distributeur de la banque de ma carte et Shima ne peut retirer qu’environ six euros, ce qui est généralement la limite de retrait par jour en Iran. Nous essaierons de faire avec ce que nous avons.

Ça y est, il est temps de se lancer dans l’auto-stop, après en avoir tant parlé nous allons découvrir par nous-mêmes comment cela se passe. Ce n’est pas très pratique car nous sommes en plein centre-ville donc nous pourrions tomber sur des voitures qui font simplement un trajet en ville et il nous faudrait une bonne heure de marche pour sortir de la ville alors qu’il est déjà tard dans l’après-midi.

Je lève donc le pouce en tentant d’afficher un sourire décontracté même si au fond de moi j’ai un léger doute sur la réaction des gens. Assez rapidement, des chauffeurs s’arrêtent mais en pensant que je cherche un taxi, la plupart ne connaissent pas le concept de l’auto-stop (qui n’a pas de mot équivalent en farsi) et lorsque Shima leur explique le principe, ils s’en vont un peu déçus de perdre une opportunité de gagner de l’argent. Certains nous conseillent de prendre un taxi et nous proposent de nous emmener à une station à proximité mais nous déclinons gentiment pour continuer de tenter notre chance. Au bout d’une petite dizaine de minutes nous avançons sur une centaine de mètres à pied avec Shima puis nous réessayons.

Je me motive en me rappelant Erfan qui m’indiquait à mon grand étonnement qu’en Iran il attendait à peine cinq minutes en moyenne pour trouver un chauffeur et j’avais lu récemment un récit fort intéressant de Ludovic Hubler, un français qui avait fait le tour du monde en auto-stop pendant cinq ans (bateau-stop également pour traverser les océans) et qui arrivait toujours finalement à trouver quelqu’un pour l’emmener.

Pour notre part, nous avons un objectif assez modeste aujourd’hui de rejoindre la ville de Sirik qui se situe à environ soixante kilomètres. J’ai vaguement repéré un hôtel dans cette petite ville mais nous verrons sur place ce que nous ferons si nous y arrivons..

Finalement, au bout de cinq minutes, nous trouvons un chauffeur qui accepte de nous déposer quelques kilomètres plus loin où l’on nous a dit que l’on devrait avoir plus de chance de trouver un conducteur allant dans notre direction. Nous acceptons car c’est toujours ça de pris et je suis bien content d’être avec Shima pour cette première expérience car nous rencontrons très peu de personnes qui parlent anglais et c’est difficile de se faire comprendre. Shima est également très à l’aise pour discuter avec les gens et c’est peut-être un peu sous son charme que notre chauffeur nous propose finalement de nous emmener jusqu’à Sirik alors qu’il habite à Minab donc cela lui fait un trajet d’environ deux heures aller-retour pour cent vingt kilomètres ! Nous sommes très agréablement surpris et soulagés d’avoir pu trouver un chauffeur pour ce premier essai, lobjectif de la journée est atteint !

Je découvre le plaisir d’arriver à la destination prévue alors que nous ne savions pas si nous trouverions quelqu’un pour nous y emmener. En plus, nous sommes piles à l’heure pour le coucher du soleil et nous prenons un petit verre de limonade avec notre héros du jour qui nous dépose au bout de la ville en bord de mer.

A l’arrivée à Sirik après notre première expérience d’auto-stop

Le spectacle est très reposant à regarder et nous sommes très fiers et heureux avec Shima d’y être arrivés. Nous prenons le temps d’observer les reflets du coucher du soleil sur les nuages et la mer, il y a pas mal de monde car nous sommes vendredi donc c’est le week-end et de nombreuses voitures roulent carrément sur la plage afin de profiter de la vue et de s’installer plus loin. Il y a à proximité un petit parc avec des bancs mais aussi des espaces individualisés avec un toit et des bancs pour permettre à des familles et des groupes de familles d’y faire un picnic à l’abri du soleil. C’est alors que nous vient l’idée avec Shima d’y passer la nuit. La température est douce, il n’y a pas de risque d’orage, nous sommes dans une petite ville donc il y a moins de risque de nous faire déranger pendant la nuit et, en plus, il y a des toilettes et un petit commerce pour acheter quelques provisions.

De mon côté, j’ai mon sac de couchage, un tapis de sol et une gazinière de camping que je n’ai pas utilisés depuis la Bulgarie et Shima a également un tapis de sol mais pas de sac de couchage. Pas de problème je pourrai lui prêter mon duvet et j’ai suffisamment d’habits chauds pour passer la nuit.

Nous choisissons donc un emplacement le plus en retrait possible et nous installons notre campement avec une certaine excitation joyeuse de sortir de l’ordinaire. Nous achetons de l’eau et des chips dans le petit commerce et je fais cuire des nouilles pour notre repas de campeurs. Il y a encore quelques voitures qui circulent avec les phares allumés et on entend un peu au loin de la musique au style reggae qui est émise par la voiture d’un groupe qui picnic dans le parc. Mais, à partir du milieu de la soirée, il n’y a quasiment plus de bruit à part le léger roulis des vagues et nous pouvons observer les étoiles et la lune dans le ciel. Shima, par son don du contact humain, parviendra à me trouver une couverture pour la nuit auprès du gérant du commerce et à lui laisser son portable et ma batterie externe pour les charger pendant la nuit.

Vue du coucher de soleil depuis notre campement en bord de plage avec des voitures qui circulent au plus près de la mer

Jour 77 (3/12/2022)

Ce matin, nous nous levons avec le soleil pour admirer sa lumière en restant emmitouflés dans notre campement de fortune. Shima s’est allongée sur un banc tandis que j’ai dormi par terre avec mon tapis de sol afin de pouvoir m’étendre complètement. La nuit a été plutôt bonne, nous n’avons pas été dérangé par du bruit et nous prenons notre petit déjeuner en admirant la mer alors qu’il n’y a personne à cette heure matinale.

Puis, nous nous nous baladons sur la plage en ramassant quelques jolis coquillages dont Shima voudrait faire une décoration. Ensuite, nous rangeons nos sacs et nous partons à pied pour rejoindre la route principale afin de recommencer l’auto-stop.  Je prépare mentalement Shima à avoir plus de difficultés à trouver un chauffeur le deuxième jour en pensant avoir eu la chance du débutant mais la suite va me prouver le contraire.

En effet, nous marchons à peine un kilomètre avec nos gros sacs sur le dos en plein soleil qu’une voiture s’arrête spontanément pour nous proposer de nous emmener dix kilomètres plus loin. La conductrice est avocate et elle nous recommande d’être prudents en nous donnant son numéro de téléphone au cas où. Nous faisons quelques provisions à l’endroit de notre première dépose puis nous reprenons l’auto-stop à la sortie du village qui n’est pas très loin. Plusieurs véhicules passent, certains s’arrêtent mais en pensant que nous voulons un taxi puis, au bout d’environ cinq à dix minutes, un jeune chauffeur nous propose de nous emmener cinq kilomètres plus loin. Nous acceptons même si c’est peu par rapport à notre nouvel objectif de la journée d’atteindre la ville de Jask située à une centaine de kilomètres. Finalement, notre chauffeur nous reprend à son retour après fait une petite course alors que nous levions le pouce depuis environ dix minutes sans résultat. Cette fois-ci il nous dépose dix kilomètres plus loin, il nous propose gentiment de déjeuner chez lui mais nous déclinons car nous préférons continuer de chercher un chauffeur afin d’avoir de la marge en cas de longue attente. C’est à mes yeux une des contraintes de l’auto-stop qui est l’incertitude sur le temps d’attente pour trouver un véhicule qui rend plus compliqué de prévoir des visites dans les environs mais on peut probablement mieux s’organiser avec plus d’expérience et du temps aussi.

Cette fois-ci, à peine ai-je levé le bras à notre troisième arrêt qu’un véhicule pick-up s’arrête et le chauffeur nous indique qu’il peut nous emmener jusqu’à la ville de Jask !!! Alors là, je n’en reviens pas que nous ayons pu trouver aussi rapidement, l’épreuve de la journée est réussie, nous pouvons désormais nous relâcher avec le sourire dans la voiture. Comme à son habitude, Shima se débrouille très bien pour faire la conversation en variant les intonations de sa voix et l’expression de son visage pour faire passer ses sentiments. Pour ma part, je suis en quelque sorte un passager clandestin qui peut dire à peine quelques mots de farsi pour remercier notre conducteur, lui indiquer que je suis français et les principaux pays que j’ai traversé ou que je compte parcourir. Sur la route, nous croisons plusieurs dromadaires sauvages, il y a même des panneaux de signalisation qui alertent sur leur présence comme en France pour des biches ou des sangliers. Le paysage est agréable à regarder avec de belles arêtes rocheuses et notre chauffeur s’arrête à un moment pour nos laisser prendre quelques photos.

Puis, il nous propose de déjeuner chez lui et de nous héberger pour la nuit. Nous le remercions de sa proposition mais nous insistons plusieurs fois pour lui dire que nous pouvons prendre un hôtel afin de s’assurer qu’il ne nous fait pas cette proposition par simple politesse (c’est la tradition du “taarof” en Iran et il est de bon ton de décliner une invitation plusieurs fois afin d’être sûr de ne pas déranger). Mais Muhammad notre bienfaiteur du jour nous confirme avec un grand sourire que cela lui ferait plaisir donc nous acceptons avec un enthousiasme partagé.

Nous sommes accueillis par sa femme qui nous sert le déjeuner assis en tailleur sur un magnifique tapis dans leur salon. Ils ont apparemment déjà déjeuné donc nous sommes les seuls à manger un plat avec du riz et une sorte de ragoût qui est bien appréciable après cette longue matinée. Puis, Muhammad repart travailler tandis que nous nous reposons dans le salon. La maitresse de maison, dont je ne me souviens plus le nom, nous présente de très beaux vêtements traditionnels féminins pour les grands évènements avec de belles couleurs vives et des dorures dont certaines sont cousues à la main par ses soins. Il y a également des masques d’apparat qui sont répandus sur les côtes iraniennes du golfe persique, j’avais vu des exemples similaires sur les îles de Hormuz et de Qeshm avec des motifs et des formes différentes.

La maitresse de maison avec ses habits traditionnels et vous pouvez également remarquer le magnifique tapis au sol

Ensuite, nous allons nous promener avec Shima pour observer le coucher du soleil en bord de mer puis, en rentrant, nous retrouvons les deux jeunes fils et la jeune fille de nos hôtes. Au début, ils sont timides et nous jettent des regards furtifs de curiosité pour ces étranges visiteurs mais je parviens à briser la glace en leur proposant de faire un jeu ensemble et le tapis du salon se transforme rapidement en terrain de foot pour une partie endiablée où un jeune voisin nous rejoint.

Muhamad rentre tard du travail vers vingt heures et nous dînons au même moment mais séparément, avec moi et Shima d’un côté du tapis et lui et sa famille de l’autre côté en étant servis les premiers. Je montre quelques photos de ma famille et de mes amis avec le petit album que j’emporte avec moi et je me sers également de mon blog pour montrer l’itinéraire de mon voyage. Nous faisons ensuite une photo souvenir avec toute la famille dans le salon puis il est tant de se coucher pour un nouveau défi le lendemain !

Notre famille d’accueil à Jask 🙂

Jour 78 (4/12/2022)

Ce matin, après avoir passé quelques coups de fils à des amis, Shima doit malheureusement repartir à Bandar Abbas pour des contraintes personnelles et professionnelles. Nous prenons le petit-déjeuner ensemble chez notre famille d’accueil en même temps qu’eux mais toujours à part puis, Muhamad nous emmène avec lui pour me déposer sur la route principale en direction de la ville de Chabahar tandis qu’il ramènera Shima à Minab où il doit emmener une voiture à réparer (son métier est dépanneur). Tout se passe vite et nous nous séparons avec émotion avec Shima un peu surpris et tristes que ce soit déjà terminé après ces deux jours de joyeuse découverte de l’auto-stop.

Cette fois-ci, je dois franchir quasiment quatre cent kilomètres pour rejoindre Chabahar donc je commence juste après m’être positionné en sortie de la ville après un ralentisseur pour que les véhicules aient le temps de me voir. J’espère que cela fonctionnera sachant que cette fois-ci je n’ai plus l’aide de Shima pour expliquer précisément notre démarche et savoir où le chauffeur pourrait m’emmener. Cette partie de la route le long de la côte est moins fréquentée et je constate que la plupart des véhicules s’arrêtent à la ville de Jask puis repartent dans le sens inverse mais il y a quand même quelques camions et voitures qui continuent dans ma direction. J’essaye d’afficher un air décontracté avec un grand sourire tout en levant le pouce mais le peu de véhicules passent sans s’arrêter. Il fait déjà chaud en ce début de matinée et il n’y a pas un coin d’ombre où je pourrais m’abriter tout en faisant du stop. Je reste patient malgré tout et parfois, si j’ai un doute sur un véhicule avec notamment plusieurs hommes à bord, je baisse la main mais c’est difficile à évaluer car les vitres sont souvent teintées dans cette région ensoleillée. Finalement, au bout d’une petite vingtaine de minutes d’attente, un camion transportant des cailloux pour la construction ralentit après m’avoir dépassé puis claxonne et met son clignotant en se déplaçant sur le côté tout en roulant doucement. Je me précipite avec mon sac, j’indique aux deux hommes dans la cabine la destination où je souhaiterais aller et ils me disent de monter. Je leur donne mon gros sac puis je gravis les échelons pour découvrir une spacieuse cabine avec deux larges sièges et un matelas installé à l’arrière. Le passager me laisse gentiment sa place sur le siège et s’installe sur le matelas. Il s’appelle Ahmad et son collègue au volant s’appelle Yazid, ils se relaient à tour de rôle tout au long du trajet. Ils m’accueillent chaleureusement et je crois comprendre qu’ils peuvent m’emmener sur une longue partie du trajet sans trop savoir jusqu’où mais je suis très heureux et les remercie vivement. Ahmad a vingt-cinq ans, Yazid en a trente-cinq et il est le papa de trois enfants, il semble être en quelque sorte le mentor de Ahmad de part son expérience ou plutôt son grand frère car ils ont une grande complicité. Ils sont originaires de la ville de Bandar Khamir située plus à l’ouest de Bandar Abbas au bord du golfe persique donc cela leur fait une longue route et heureusement qu’ils sont à deux. Ahmad me montre fièrement des photos et des vidéos de sa région avec de belles plages et de la mangrove ainsi que des cafés avec musiciens et, effectivement, cela donne envie d’y aller. A mon tour, je lui présente mon album photo ainsi que la carte de mon itinéraire sur mon blog.  Ahmad et Yazid sont très sympathiques, ils m’offrent des pistaches puis, à un arrêt, ils m’achèteront des boissons énergisantes et des sucreries qui les aident à rester attentifs sur la route.

La cabine surélevée en hauteur avec une large vitre offre un beau panorama et la route au sud de la région du Baloutchistan iranien est très belle avec de hautes falaises rocheuses aux formes variées, des dromadaires, des chèvres et avec en fond sonore de la musique de la région de Ahmad et Yazid.  La route n’est pas toujours en très bon état, il y a des nids de poules qui obligent à ralentir tout comme les dromadaires ou les chèvres qui traversent la route. Le paysage est très aride mais il y a quand même quelques palmiers dans des petites oasis et aussi nous croisons à un endroit un vaste champ de bananiers.

Nous traversons également quelques petits villages où les habitations sont vétustes avec du béton à nue sans même du crépit. La grande majorité des hommes portent la tunique traditionnelle des baloutches avec différentes couleurs généralement au ton clair et je vois peu de femmes dans les rues.

Je trouve la cabine assez confortable mais ça doit être une autre histoire quand il faut rouler une dizaine d’heures. Nous faisons une pause petite commission dans un endroit magnifique, en hauteur, surplombant une vallée semi désertique avec quelques arbres et au loin de hautes falaises avec des formes sculptées par l’érosion, je savoure ce moment.

Ensuite, la route s’aplanit et la qualité de l’asphalte s’améliore puis je vois que Ahmad et Yazid discutent de l’itinéraire en semblant essayer de me déposer au plus près de ma destination finale. J’essaye de leur faire comprendre de ne pas faire un long détour pour moi et ils me répondent d’un sourire. Ils finissent par me déposer à environ une vingtaine de kilomètres de la ville de Chabahar et, dans la précipitation, j’oublie à mon grand regret de prendre une photo souvenir avec eux alors que nous avons passé quasiment cinq heures ensemble. Il faudra donc vous contenter de ma description !

Mise à jour du 31/01/23, voici une photo qu’ils m’ont gentiment envoyé à ma demande: Yazid est à gauche puis Ahmad est à droite avec leur camion derrière

De retour à l’auto-stop, j’ai tout juste le temps de lever mon pouce qu’une voiture s’arrête à mon niveau, je n’arrive pas à y croire. Je m’approche du véhicule en cherchant à expliquer que je ne souhaite pas de taxi pour aller à Chabahar et le passager sur la banquette arrière me répond en anglais qu’il connait bien le principe de l’auto-stop et qu’il peut même m’héberger chez lui à Chabahar. Il s’appelle Vahid, il a trente-trois ans, il habite Téhéran avec sa femme et leur petite fille mais il a des projets de constructions immobilières à Chabahar donc il vient régulièrement sur place pour les superviser. Il est venu de Téhéran en avion et il a pris un taxi pour se rendre à son domicile où il se propose de m’emmener. Je n’en reviens pas de la facilité de faire de l’auto-stop dans cette région (et apparemment dans tout l’Iran) et surtout de l’incroyable hospitalité des iraniens même si j’avais déjà entendu plusieurs témoignages similaires de la part de voyageurs. Et ce n’est pas tout, en arrivant dans sa maison, Vahid me fait visiter les différentes pièces en me disant de faire comme si j’étais chez moi, il allume son vidéoprojecteur en prévision du huitième de final de l’équipe de France (oui je sais, je suis accro) et il s’en va à son travail en me laissant les clés de chez-lui alors que nous nous connaissons depuis à peine trente minutes ! Qui ferait cela en France ou dans un autre pays? Pour ma part, je ne pense pas que je l’aurais fait mais l’attitude altruiste de Vahid m’incite à reconsidérer ma réaction possible dans ce type de situation si je me retrouvais à sa place.

En attendant le début du match, j’essaie désespérément de mettre à jour mon blog car j’ai pris beaucoup de retard à cause de problèmes pour télécharger mes photos, sans doute à cause du manque de réseau et puis j’ai été aussi pas mal occupé ces derniers jours en changeant régulièrement de lieu et en faisant de belles rencontres. Malheureusement, même avec le wifi de Vahid, cela ne fonctionne toujours pas donc je ne sais plus quoi faire. Je lance un SOS à mon ami Thomas qui m’avait déjà bien aidé pour le lancement de mon blog, étant lui-même un créateur et administrateur de site internet pendant son temps libre, et en attendant sa réponse, je continue d’avancer sur l’écriture des articles pour les illustrer plus tard avec des photos.

Vahid revient du travail pile au moment du match, nous regardons ensemble la belle victoire des bleus contre l’équipe de la Pologne puis nous dînons chez lui. Ensuite il me propose d’aller dans un café situé sur le toit d’un hôtel et nous rentrons ensuite nous coucher.

Je vous décrirai la visite de la ville de Chabahar et des ses environs dans un prochain article qui sera le dernier sur l’Iran. Cap à l’est!