Du 8 au 10 juin 2023
Aussitôt arrivé au Monténégro, je roule sur une superbe route de montagnes dont certains passages ont été creusé à travers la roche. Il y a très peu de véhicules dans ce coin, je traverse de petits villages ou villes pittoresques installés dans des plaines verdoyantes au pied de montagnes. C’est assez similaire à nos paysages de montagne d’Europe occidentale, il y a quelques édifices ou chalets en bois, la différence est que les clochers sont remplacés par les minarets.
Après avoir longtemps cherché le long de la route, je trouve enfin un joli arrêt pour un pique-nique avec vue sur une vallée verdoyante entourée de moyennes montagnes. Des nuages noirs menaçants sont agglutinés aux sommets des montagnes et, malgré la distance, on peut entendre le tonnerre gronder avec toute sa puissance, ce n’est donc pas le moment de faire une sieste et je me remets en selle rapidement.
Un peu plus loin sur la route, je vois un panneau indiquant une route panoramique qui n’est pas dans la direction initiale que j’avais prévu. Pas de problème, je suis flexible et je fais ce tour à moto pour voir de belles routes et de toute façon cela ne me fera pas un trop gros détour donc j’y vais. En avançant, je croise plusieurs groupes de motards dans les deux sens, c’est bon signe. Cette route panoramique large et bien entretenue au milieu des montagnes me rappelle avec plaisir la route en Autriche et il y a d’ailleurs un joli lac de montagne près de la ville de Plav comme j’avais pu en voir dans ce pays.
Il y a désormais de plus hautes montagnes avec un peu de neige éparpillée autour des sommets pointus. Je fais encore un détour pour aller voir une vallée encaissée dont les montagnes au loin me font envie et, plus je m’approche plus le spectacle est majestueux, je commence à me dire que je pourrais passer la nuit dans le coin. C’est déjà le milieu d’après-midi et j’ai de la marge sur mon planning, ensuite je longerai la côte le long de la mer Adriatique et je ne reverrai sans doute pas les montagnes avant un moment. De plus, j’ai une tente et de la nourriture en cas de besoin. Allez, je vais voir ce qu’il y a au bout de cette vallée dénommée « Grebaje ».
Le paysage est enchantant, c’est pour ce genre de route que je fais de la moto! Je m’arrête plein de fois pour prendre des photos de la vue sur les montagnes qui se rapprochent petit à petit et me font découvrir de nouveaux sommets et leur taille imposante face à une vallée étroite et bucolique.
À l’entrée du parc, il faut payer un ticket d’entrée et je demande où je peux camper, on m’indique l’arrière d’un restaurant hôtel mais finalement j’opte pour une chambre qui est seulement deux fois plus cher que le camping et surtout parce que les nuages sont de plus en plus menaçants. C’est un bon choix car, à peine suis-je installé, que l’orage se met à gronder avec des éclairs et la pluie tombe pour un long moment.
Quand la pluie cesse, je marche au fond de la vallée qui aboutit à un cirque fermé par une ceinture de montagnes se dressant comme les dents acérées d’une mâchoire. L’ancien glacier qui a creusé cette vallée a désormais disparu et la végétation l’a progressivement remplacé, cette verdure est tout aussi belle que la blancheur de la neige. Les nuages commencent à se disperser et à laisser la place au soleil qui illumine la vallée et les montagnes qui l’entourent avant de disparaître derrière celles-ci. Je reste un long moment à contempler ce paysage majestueux et apaisant en entendant le chant des oiseaux.
J’adore ces belles découvertes imprévues, assurément un nouveau coup de cœur et je ne suis pas au bout des bonnes surprises avec la journée du lendemain. En attendant, je prends un bon repas monténégrin à l’auberge, c’est un plat à base de polenta avec du fromage fondu et du yaourt accompagné d’un verre de vin rouge, c’est ça la montagne aussi !
Au petit matin, je fais une photo souvenir avec ma moto de ce cirque de montagnes grandiose alors que le ciel est complètement dégagé. En partant, je ferai de nombreux arrêts pour me retourner et contempler une dernière fois ce spectacle magnifique.
Ensuite, je rejoins la grande vallée qui offre une belle vue également sur les villages au pied des montagnes puis je passe le poste frontière de l’Albanie afin de redescendre au sud vers la côte Adriatique puis repasser au Monténégro. Le garde-frontière albanais est jovial et débonnaire, il me fait comprendre avec un large sourire qu’il n’a pas très envie de m’embêter avec ces contrôles et qu’il me fait confiance, je passe donc assez rapidement en lui faisant un signe de la main en partant.
Aussitôt passé en Albanie, je fais une pause devant une mini-gorge creusée par une rivière à l’eau cristalline. La route est tout aussi belle qu’au Monténégro et je croise très peu de véhicules, les virages en épingle se succèdent en passant d’une vallée à une autre avec des petits villages de montagnes qui ont très souvent une église au centre et parfois un grand calvaire au bord de la route.
Après avoir passé un petit col, la route redescend en lacets en longeant d’un côté des parois rocheuses vertigineuses et de l’autre un ravin qui plonge dans une vallée très étroite et profonde. J’en prends plein les yeux, c’est magnifique.
Une fois descendu dans la vallée, une large rivière à l’eau transparente de couleur émeraude s’écoule au milieu des montagnes rocheuses et de la végétation, j’ai les yeux qui brillent de mille feux.
Ensuite, la route remonte à flanc de montagne et c’est un vrai serpentin digne d’un circuit de motos pour le bonheur des groupes de motards qui se suivent en file indienne dans une succession de virages en épingles pour finalement passer un col qui donne accès à une vaste plaine d’où l’on peut voir l’immense lac de Skadarsko qui est partagé entre le Monténégro et l’Albanie.
C’en est fini de la montagne mais il reste quand même de hautes collines et je me laisse à nouveau séduire par des panneaux indiquant une nouvelle route panoramique. Elle est étroite et elle monte sur les hauteurs des collines en offrant de beaux points de vue sur le lac et cet itinéraire est peu fréquenté. Puis, la route s’enfonce dans une sorte de garrigue où il n’y a quasiment pas d’habitation.
La végétation est au plus près de la route et réduit la visibilité donc je me souviens du conseil de mon père motard lorsque nous avions fait une virée ensemble (« Quand je ne vois pas, je ralentis ») et je le mets en pratique.
Par ailleurs, même si ces routes de montagnes offrent des panoramas magnifiques, je commence à fatiguer, cela demande davantage d’efforts physiques et de concentration avec les multiples virages à effectuer en changeant les vitesses, en freinant puis accélérant. Mes épaules et mes poignets sont endoloris, j’ai le cou qui m’élance et je transpire à grosses gouttes sous le soleil avec mes équipements de protection.
Mais, aussitôt que je rejoins une route très fréquentée, j’ai envie de repartir sur une voie alternative quitte à faire plus de distance et de virages. Donc j’emprunte une nouvelle et dernière route panoramique qui passe en plein cœur du parc national de Lovcen pour rejoindre la ville de Kotor où j’ai réservé un hébergement. Ce parc est très rocailleux mais la route est excellente : large avec un revêtement impeccable, une bonne visibilité et des virages pas trop serrés.
Après avoir passé le parc, la route donne sur un magnifique point de vue sur une baie très encaissée entourée par de moyennes montagnes et tout autour de laquelle il y a de nombreuses petites villes portuaires historiques: ce sont les “bouches de Kotor”. Pour y accéder, il faut encore suivre un interminable serpentin de virages en épingles sur une route étroite et, cette fois-ci, il y a du monde donc il faut être vigilant. Depuis que je suis au Monténégro, je croise énormément de motards et cela se comprend quand on voit la beauté de ces routes, c’est la meilleure partie que j’ai faite en moto avec celle en Autriche au voyage aller.
Avant de m’installer à mon auberge qui est un peu à l’écart du centre-ville, je fais un arrêt pour visiter le quartier historique de Kotor derrière ses murailles. Il y a comme un air d’Italie quand on s’y promène avec ses rues pavées étroites, ses volets de couleurs, ses places avec ses jolies petites églises en pierre. Et pour cause, la ville de Kotor, comme une grande partie des côtes de la mer Adriatique, était sous contrôle vénitien du XVème au XVIIIème siècle. Je marche au hasard dans les ruelles, c’est un vrai labyrinthe et les édifices sont très bien entretenus, c’est une très jolie ville.
Ensuite, j’arrive enfin à mon auberge et je profite de la lumière du jour tardive en ces journées de juin pour aller me baigner dans la baie, il y a une plage juste à côté et cela me fait beaucoup de bien de détendre mes membres et de rafraichir mon corps dans l’eau tout en contemplant les montagnes qui ceinturent la baie. Quelle journée fabuleuse, ce fut une succession de routes magnifiques dans des décors somptueux, je suis passé de la montagne à la mer en quelques heures de routes. J’ai des étoiles plein les yeux.
Le soir, je sors dans des bars de Kotor avec d’autres pensionnaires de l’auberge puis on se pose sur la plage jusque tard et je finis par aller me coucher car je compte reprendre la route le lendemain.
Après une petite grasse matinée, j’enfourche ma bécane et je longe toute la baie pour rejoindre ensuite la côte croate. C’est très beau, je visite une autre ville portuaire appelée Perast qui a également de nombreux édifices historiques dans le même style que Kotor, ce devait être une région très riche et puissante à l’époque de Venise.
Je prends mon temps pour regarder les points de vue car je suis conscient que je n’en verrai pas souvent de cette qualité mais il faut bien avancer et je finis par rejoindre mon dernier poste frontière avant de rentrer dans l’Union Européenne, nouvelle étape importante ! C’est la cohue en ce vendredi après-midi, il y a beaucoup de monde et je suis les motards qui remontent les files de voitures puis je n’ai plus qu’à attendre patiemment mon tour pour rejoindre la Croatie que je vous raconterai dans un prochain article 😊